Quand il avait eu des nouvelles de Amy, ça avait été comme un… sacré retour en arrière qui n’avait rien de réellement agréable. En soit, le souvenir de Amy était agréable, mais il le ramenait bien trop à des mauvais souvenirs. Ça avait été un choc oui et Dennis ne risquait pas d’oublier l’horrible nuit qu’il avait passé ensuite, pleine de cauchemar. Incapable de s’endormir, alors qu’il n’avait même plus de quoi lui permettre de bien dormir justement. C’était en partie pour ça que le jeune homme avait décidé de ne pas répondre, de ne pas prendre contact avec Amy. Il savait que ce n’était pas une bonne chose, mais il n’avait pas pu s’en empêcher. Ou plutôt, il n’avait pas pu faire autrement que de ne rien faire. Ce n’était pas contre elle à proprement parlé, mais c’était… c’était trop dur encore. Il savait bien qu’il devrait sans doute tourner la page, mais comment le faire après ça. Alors qu’il continuait d’être hanté par ce qui s’était passé, alors qu’il continuait d’avoir peur de tout.

Même alors qu’il ne se trouvait plus à l’orphelinat, qu’il n’avait pas vu Jedusor depuis longtemps. Il avait donc décidé de ne pas répondre à Amy et de tenter… de mettre ça de côté. Ça avait marché pendant plusieurs jours (enfin marché était un terme un peu mauvais, puisqu’en réalité Dennis y avait pensé à longueur de temps). Il avait trouvé un petit boulot, de livreur de journaux et ça avait occupé un peu son temps. Un peu seulement, parce qu’il faisait ça très tôt le matin, avant que tout le monde ne se lève pour aller travailler. Ça lui convenait, même si ça n’allait pas durer, il ne le faisait que pour remplacer quelqu’un d’absent pendant un temps, son contrat ne durait que quelques jours. Ça lui convenait parce qu’il ne voyait pas grand monde. Se promener dans les rues de Londres alors qu’il faisait encore nuit n’était clairement pas la situation la moins angoissante qui puisse exister, mais il ne croisait pas un rat la plupart du temps. Parfois, un bruit ou deux le faisaient un peu sursauter, emballait son cœur, mais ça allait. Il parvenait à garder contenance.

Et finalement, il y avait eu cette nouvelle nuit de cauchemar où il n’avait finalement pas réussi à fermer l’œil. Les heures de travail ensuite n’avaient pas été évidente et le jeune homme n’avait fait que penser à Amy. Alors, il se décida… il était peut-être temps qu’il lui réponde. Il le fit… il avait écrit au moins dix fois la lettre avant de se décider à l’envoyer, incapable de réellement savoir ce qu’il devait lui écrire. Elle voulait le voir et ils devaient peut-être se voir en effet. Donc, Dennis lui avait proposer de le retrouver chez lui un jour. C’était sans doute le mieux, ou pas, en fait il n’en savait rien. Mais il n’avait pas spécialement envie de mettre le nez dehors. Même si son appartement ne payait vraiment pas de mine.

Et finalement, elle frappa à la porte. Le cœur battant, Dennis alla lui ouvrit. Quand ses yeux se posèrent sur elle, il fut incapable de dire quoi que ce soit.

C’était vraiment bizarre de l’avoir sous les yeux. Après toutes ces années, il avait à peine du mal à réaliser qu’elle était bel et bien là. Ses yeux ne la quittaient pas, ne sachant pas du tout ce qu’il devait faire. Peut-être qu’il devrait quand même lui dire quelque chose. Peut-être qu’il pourrait la saluer pour commencer ? Oui, ça pourrait être bien. Mais il n’y avait définitivement aucun mot qui réussissaient à sortir de sa bouche. Et puis finalement, ce fut Amy qui prit la parole, le saluant. Dennis avait le sentiment qu’elle n’était pas beaucoup plus à l’aise que lui, ou alors il se faisait peut-être des idées. Concrètement, il ne savait pas du tout quoi penser. Elle le remercia de l’avoir invité, Dennis afficha un léger sourire un peu idiot sans doute. Il ne savait pas si elle avait raison de le remercier, parce que bon… il avait quand même mis du temps avant de répondre. Quand elle lui demanda si elle pouvait entrer, Dennis eu un peu comme un choc réagissant enfin pour la première fois depuis qu’elle était là.

« Oh ou… oui bien sûr. » Dit-il en s’écartant pour la laisser entrer dans son appartement. Il se sentait définitivement bête, il n’avait aucune idée de ce qu’il devait dire, de ce qu’il devait faire. Enfin, il avait quand même pris la peine de s’écarter pour lui permettre de rentrer dans l’appartement, ce qui n’était pas trop mal déjà. « Je… je suis désolé d’avoir mis si longtemps à te répondre. »

Il s’en voulait en effet, parce que pendant un temps il n’avait pas eu l’intention de répondre à son courrier. Ce n’était pas contre elle, mais forcément… le fait de répondre à Amy, ça n’avait fait que le ramener des années en arrière. Maintenant encore, le fait de l’avoir devant ses yeux, après tout ce temps, ça ne pouvait que lui rappeler ce qu’ils avaient vécu. Ce qu’il cherchait à oublier évidemment, mais en même temps il devait bien avouer qu’il ne parvenait pas du tout à oublier.

« Tu… tu veux boire quelque chose ? » Demanda-t-il alors, reprenant rapidement. « Enfin, je… je crois que j’ai du jus de fruit. » Dit-il avant d’ouvrir si réfrigérateur pour voir que sa bouteille de jus de fruit n’avait pas vraiment une très belle tête. « Enfin, j’ai de… l’eau surtout. »

D’accord, on faisait quand même beaucoup mieux comme hôte en cet instant précis. Il aurait clairement dû réfléchir à tout cela avant que Amy arrive, mais il avait surtout passé son temps à penser au fait qu’il allait recevoir Amy et qu’il ne savait pas du tout s’il était prêt à la revoir. Concrètement, il avait envie de croire en cet instant précis qu’il ne l’était pas vraiment, prêt. Il en était au point de se dire qu’il avait fait une erreur de l’inviter et en même temps… elle était là, devant lui et il ne pouvait pas nier qu’il appréciait vraiment de la revoir. Même si c’était bizarre.

Dennis ne savait pas du tout si Amy affirmait qu'un verre d'eau c'était bien pour lui faire plaisir ou parce qu'elle le pensait vraiment. En un sens, ça n'avait pas forcément de l'importance mais au fond, le jeune homme ne pouvait pas s'empêcher de trouver ça important quand même. On faisait mieux comme première impression depuis toute ces années. Ça faisait quand même un moment qu'ils n'avaient pas pu se voir avec Amy et le jeune homme avait un peu le sentiment de tout gâcher. Il se mettait sans doute un peu trop la pression mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Il avait envie de faire bonne impression avec Amy, même s'il n'avait peut être pas besoin de ça. Mais il se disait qu'elle devait déjà ne pas avoir trop appréciée qu'il lui reponde si tard, il ne voulait pas qu'elle pense qu'il n'avait aucune envie de la recevoir. Alors que bon, au final, il l'avait invité chez lui. C'était quand même parce qu'il voulait qu'elle vienne.

Bon d'accord, il se posait sans doute beaucoup trop de questions. Mais il avait toute les peines du monde à se sentir à l'aise. Ce n'était pas contre la jeune femme – au contraire, il ne pouvait que constater qu'il appréciait de voir son visage, de l'entendre parler, de la voir sourire même – c'était juste que ça chamboulait un peu les choses et il ne se sentait pas à l'aise. Il prit donc le parti de servir deux verres d'eau, invitant la jeune femme à s'installer sur une des chaises de son appartement. Ça ne payait vraiment pas de mine, mais il ne pouvait pas se payer mieux de toute façon.

« Ça… ça va. » Répondit-il quand Amy lui demanda comment il allait. « Je… J’ai pas eu la chance de me faire adopter, donc je me débrouille comme je peux. »

A peine avait-il dit ça qu'il ne put s'empêcher de s’en vouloir, craignant que Amy interprète mal ses propos. Ce n'était évidemment pas un reproche qu'il lui faisait à elle, bien évidemment, même si effectivement, la jeune femme avait eu de la chance d'être adoptée. Enfin, en même temps, il ne savait pas du tout comment était la vie de Amy maintenant et peut être qu'elle ne se sentait pas bien avec ses parents. Puisque ils n'avaient pas gardé contact pendant titrés ces années, il n'avait aucune idée d’à quoi pouvait bien ressembler la vie de Amy depuis qu'elle avait quitté l’orphelinat. Au moins, avant, même s'ils ne se parlaient déjà plus vraiment, il pouvait la suivre de loin. Non pas qu'il soit un fou qui suivait les femmes bien sur, ce n'était pas ça. C'était juste… il n'avait jamais vraiment pu s'empêcher de l'observer parce qu'elle lui manquait.

« Tu vas bien… toi ? »

A chaque fois qu'un prenait la parole, Dennis avait vraiment le sentiment d'être un idiot.

Quand Amy se contente de répondre qu'elle croie allait bien, Dennis ne put s'empêcher de trouver que c'était trop peu. C'était mieux que de l'entendre dire qu'elle n'allait pas bien, évidemment, mais en même temps, il aurait bien aimé qu'elle lui dise qu'elle allait bien tout simplement. Mais en même temps, le jeune homme était bien placé pour savoir que ce n'était pas forcément possible, que Amy ne pouvait pas aller bien tout simplement. Comme lui au final. Dennis avait envie de se dire qu'il n'allait pas si mal que cela, en grande partie parce qu'il avait été bien pire dans sa vie, mais en même temps il n'allait pas non plus si bien que ça. Quand il allait bien, c'était surtout qu'il n'allait pas trop mal. Ce n'était donc pas si positif que ça finalement, mais en même temps le jeune homme ne pouvait pas vraiment donner mieux.

Amy affirma alors qu'elle était passé par pas mal de chose dernièrement. Le jeune homme était loin d'imaginer une seule seconde ce qu'elle voulait dire par là et encore moins qu'elle avait découvert des choses dont il ignorait tout encore, notamment le monde magique. Même si Dennis avait eu l'occasion, l'horrible occasion, de voir de la magie à l'œuvre. Il avait envie de la questionner un peu, et en même temps il ne savait pas s'il avait envie de savoir. Est-ce qu'il ne valait pas mieux qu'ils se contentent juste de… ne pas entrer dans les détails ? Non pas qu’il n’en avait pas envie d’en savoir plus, mais tout dépendant ce qu’elle avait vécu. Elle avait dû en vivre un tas de chose depuis qu’elle avait quitté l’orphelinat et c’était une bonne chose, clairement… c’était juste que Dennis craignait un peu de… regretter certaine chose. Et il était évident qu’il se posait bien trop de question.

« Oh non tu… tu n’as pas à t’excuser. » Dennis ne l’avait pas forcément montré précédemment, mais il n’en voulait absolument pas à Amy d’être partie. Même si ça avait été un nouveau coup dur, quand bien même ils ne se parlaient plus vraiment à l’époque, il ne lui reprochait rien. Comment lui reprocher d’être libre ? Dennis avait peut-être été un peu jaloux, il ne pouvait pas le nier, mais il ne lui reprochait vraiment rien. « C’était une… c’était bien que tu partes. » Dennis se rendit compte de ce qu’il venait de dire et reprit rapidement d’une voix tremblante. « Pas pour moi, tu… enfin, même si… » On sentait le mec doué là ? « Il valait mieux que tu sois ailleurs que là-bas avec… tu sais. » Elle savait, elle savait forcément. « Mais c’est vrai que tu… » Dennis soupira, baissant son regard. C’était à se demander s’il avait déjà parlé autant depuis un moment. « Tu m’as manqué. »

Parce que même s’ils ne se parlaient plus vraiment depuis un moment, ils se voyaient quand même et cette présence lui faisait du bien.

C’était particulier de se retrouver de nouveau en présence de Amy. Pas seulement parce que celle-ci lui rappel forcément les épisodes de leurs enfances. Ce n’était pas pour rien qu’ils ne se parlaient plus beaucoup quand ils vivaient encore à l’orphelinat tous les deux, parce que c’était trop difficile de se parler et de penser constamment à ce qui s’était passé. Bon, même sans se parler, ça ne les empêchait pas d’y penser cela dit. Mais il n’y avait pas que cela, Dennis se sentait… troublé. Sans trop savoir dire pourquoi, mais elle lui avait réellement manqué, en la voyant devant lui maintenant il se rend compte à quel point sa présence lui avait manqué. Ce qui ne l’aide pas forcément pour se montrer clair et précis dans ses propos, au contraire, il avait même le sentiment de bafouiller plus que d’habitude. Mais il pensait avoir fait passer le message important, Amy lui avait manqué, réellement.

Et il avait beaucoup manqué à Amy également, Dennis ne put s’empêcher d’afficher un petit sourire un peu mal à l’aise quand même en voyant la jeune femme baisser son regard. Ça le touchait, vraiment, plus qu’il ne l’aurait pensé. Il avait beaucoup pensé à elle pendant tout ce temps, même s’il n’avait jamais fait le pas de la retrouver. Il avait mis du temps avant de répondre à son courrier également, parce que Amy n’était pas juste une vieille amie et il n’avait aucune idée de comment gérer tout cela. Visiblement… ça n’allait pas s’arranger d’ailleurs.

Dennis la vit plus mal à l’aise encore, triturant ses doigts comme pour se donner quelque chose à faire. Il reconnaissait ce geste, il le faisait à longueur de temps quand il devait faire quelque chose dont il ne se sentait pas capable de faire. Elle reprit la parole, affirmant qu’elle avait quelque chose à lui dire et qu’elle ne savait pas comment le faire, que ça allait être difficile à entendre. Forcément, les derniers mots de Amy ne purent qu’inquiéter le jeune homme. De quoi voulait-elle parler ? Est-ce que ça avait un rapport avec Jedusor ? Il n’y avait aucune raison, mais en même temps… Dennis avait le sentiment que tout avait un rapport avec le jeune homme de toute façon. Sa vie d’aujourd’hui avait un rapport indirect avec ce que Tom Jedusor lui avait fait autrefois, parce qu’il était celui qu’il était maintenant à cause de lui. Il espérait quand même que ça n’ait pas de rapport, même si au vu de la situation le jeune homme ne pouvait que craindre le pire.

« Vas-y, je t’écoute. »

Maintenant qu’elle avait commencé, de toute façon, Dennis voulait entendre la suite, même si c’était difficile. Ça pouvait être plus difficile que ce qu’ils avaient déjà vécu. Très franchement, il se disait que non, parce qu’il ne pensait pas vivre un instant plus horrible que cette épisode en particulier.

Au fond, Dennis ne savait pas réellement s’il était possible pour lui de trouver quelque chose difficile à entendre depuis… eh bien, qu’il avait vécu le pire moment de sa vie. À ses yeux, il n’y avait pas pire que ça. Mais en même temps, vu comment ce moment continuait de lui pourrir l’existence, c’était évident qu’il devait s’attendre au pire. Surtout que Amy avait quand même l’air vraiment troublée. Elle lui affirma donc que plusieurs semaines auparavant, un homme était venu chez elle dans le but de lui parler de…

Lui.

Dennis sentit un frisson parcourir son échine en entendant les mots de Amy. Forcément, il ne pouvait que savoir de qui elle parlait, ce lui était plus qu’évident et rien que de penser à « lui » justement, le jeune homme se sentait mal. Mais l’idée surtout que quelqu’un parle de cette personne à Amy, ça le mettait également mal à l’aise. Il avait cru qu’en partant de l’orphelinat, son amie allait pouvoir tourner la page. Mais en même temps, de son côté, il n’avait jamais réussi à tourner la page même s’il avait quitté l’orphelinat de son côté. Amy continua, sous le silence de Dennis, affirmant que l’homme en question faisait parti d’un groupe de personne qui cherchait à l’arrêter. Parce que « Lui » était devenu encore plus dangereux. C’était possible ça, sérieusement ? Apparemment ça pouvait être le cas en effet, il pouvait vraiment être dangereux. Ces personnes étaient comme lui donc, mais du bon côté. Des… sorciers.

Dennis resta pendant plusieurs secondes sans rien dire, tentant d’analyser les propos de son interlocutrice. Oh, il ne doutait pas une seule seconde qu’elle était sincère, le jeune homme la connaissait suffisamment bien pour savoir qu’elle ne se permettrait pas de lui faire ce genre de « plaisanterie ». Elle ne lui mentirait pas, pas comme ça en tout cas. Mais c’était dingue, vraiment dingue… et en même temps, ça permettait d’expliquer un peu les choses, un peu ce qu’ils avaient… subi.

« Des sorciers ? » Demanda-t-il, la voix tremblante. « Co… comment ça des… sorciers ? » Tom Jedusor était un sorcier donc ? Et il y en avait d’autres ? Des personnes du bon côté, des personnes gentilles, mais qui pouvait faire comme Jedusor ? « Comment c’est… possible ? » Dennis se sentait vraiment perdu. Il y avait de quoi. On ne pouvait pas vraiment dire qu’on l’avait préparé à entendre tout ce qu’il était en train d’entendre en plus de revoir Jedusor s’installer de nouveau dans une de ces conversations. Ce n’était pas pour rien qu’il n’avait pas pu s’empêcher de s’éloigner de Amy, alors qu’il tenait énormément à elle. Parc que ça le ramenait toujours à cette grotte. « Il… il y en a beaucoup ? »

Des sorciers ? Des personnes comme lui ? Et comment elle pouvait être sûr qu’ils étaient gentils ? Et Jedusor… il était où dans tout ça ?

Des sorciers… ça semblait vraiment dingue, mais en même temps ça pouvait quand même expliquer beaucoup de chose. Amy et lui n’étaient pas fous, du moins pas comme beaucoup pourrait bien se l’imaginer, ils étaient… particuliers depuis ce qu’ils avaient vécu, mais ils avaient réellement vécu ce qu’ils avaient vécu. L’épisode de la grotte n’était pas juste dans leur tête, même si ça aurait été bien plus facile de se le dire et que Dennis avait quand même longuement cherché à s’en convaincre. Mais ce n’était pas dans leur tête, ils ne l’avaient pas imaginé, ils l’avaient vraiment vécu. Alors en soit, le fait de lui sortir que tout cela n’était autre que de la magie, qu’il y avait des sorciers… ça ne l’étonnait pas plus que cela non plus, ça expliquait beaucoup de chose.

Quand bien même ça permettait aussi beaucoup de remettre tout cela sur le devant de la scène. Déjà que revoir Amy ne pouvait pas l’empêcher de faire un retour en arrière, mais il savait qu’il ne pouvait pas le lui reprocher, parler de tout ça, parler de « lui » ça faisait vraiment remonter ses angoisses. Ces angoisses étaient toujours là, elles ne disparaissaient jamais complètement surtout que rien ne pouvait réellement lui permettre d’aller mieux. Amy lui affirma qu’elle ne savait pas trop s’il y en avait beaucoup, mais qu’elle savait simplement que ces sorciers étaient comme eux, qu’ils avaient juste des capacités en plus. Et surtout qu’ils étaient sincères et qu’ils cherchaient à l’arrêter… « lui ». Dennis sentit un frisson le parcourir à l’évocation des Jedusor, ne sachant pas vraiment comment interpréter les mots de son amie. Si elle pensait que ces personnes étaient sincères, c’était qu’il pouvait sans aucun doute avoir confiance en eux. Mais en même temps, ça ne pouvait pas résoudre tous les soucis non plus, bien au contraire.

« S’en débarrasser… » Répéta-t-il, la voix tremblante, baissant son regard. Instinctivement, il croisa les bras, comme une manière pour lui de se protéger, de se contenter d’être juste là et seulement là. De ne pas appartenir à ce monde extérieur, même si c’était quelque chose qu’il ne pouvait pas contrôler. « Tu sais bien que… enfin, c’est pas possible. »

Ça ne l’était pas, personne ne pouvait faire quoi que ce soit contre lui. C’était impossible, il était bien trop… bien trop fort, bien trop maléfique. D’accord, Dennis n’avait pas encore eu l’occasion de le revoir depuis qu’il avait quitté l’orphelinat, mais il l’avait quand même croisé de nombreuses fois à chaque fois qu’il rentrait de son école. Il grandissait, il devenait de plus en plus monstrueux, il le voyait. Déjà quand… à ce moment-là ils n’étaient que des gosses, et ça avait déjà été horrible. Dennis n’osait pas imaginer une seule seconde de quoi il était capable à présent.

Dennis aimerait bien se réjouir de la situation et se dire qu’ils allaient pouvoir voir Jedusor payer pour ce qu’il avait osé leur faire, mais il en était incapable. La seule chose qu’il comprenait c’était qu’il y avait des personnes suffisamment folles pour s’imaginer qu’il était possible de faire quoi que ce soit contre leur ancien partenaire d’orphelinat. Amy semblait y croire de son côté et Dennis aimerait bien le faire aussi, mais il avait eu l’occasion de voir Jedusor à chaque été dès qu’il rentrait de son école, il l’avait vu continuer à évoluer dans le sens où il allait, dans la noirceur. Il n’avait plus de nouvelle de lui depuis qu’il avait quitté l’orphelinat – et il aimerait bien que ça continue comme cela, mais ça n’allait pas être le cas malheureusement –, mais il se doutait que ça n’allait pas aller mieux. Et il avait raison apparemment, puisque des personnes cherchaient à l’arrêter visiblement. Même s’il avait réellement envie d’y croire, il n’y parvenait pas. Il ne pouvait pas…

Amy s’approcha de lui et posa une main sur son bras. Mine de rien, ce geste lui fit un peu de bien. Évidemment, Dennis n’allait pas soudainement abandonner ses craintes et ses angoisses simplement parce que Amy posait sa main sur son bras, mais en même temps ça lui faisait vraiment du bien. Elle lui affirma qu’elle avait envie d’y croire, que même s’il n’y avait qu’une petite chance de l’arrêter, elle voulait la saisir. C’était sûr que ça serait quand même une bonne chose qu’il soit arrêté et encore, Dennis ne se rendait pas compte que ça allait être plus que vitale pour lui.

« Je ne sais pas… » Dit-il en baissant son regard. Il n’avait pas envie de se montrer à ce point défaitiste, mais en même temps il ne pouvait pas s’en empêcher non plus. Il aimerait bien se montrer plus serein, il aimerait bien avoir confiance en ce qui pouvait arriver, mais la vie lui avait plutôt montré le contraire. Mais en même temps, le jeune homme se disait quand même que s’ils n’étaient pas seuls, peut-être que ça pouvait être un peu plus facile. Il ne savait vraiment pas, mais il n’avait pas non plus envie de complètement se refermer. « Mais on peut… on peut voir. »

Il aimerait vraiment se montrer plus sûr de lui, mais ce n’était pas possible. Il ne pouvait pas vraiment faire plus, c’était déjà un grand effort qu’il faisait actuellement d’affirmer qu’ils pouvaient voir ce que ça allait donner et surtout d’accepter le fait qu’il y avait tout… eh bien, tout ça. La magie qui existait apparemment, et qui expliquait quand même vraiment ce qui était arrivé, ce qui leur était arrivé. C’était juste impensable et pourtant… ça expliquait tellement de chose. Au final, le jeune homme ne savait pas réellement quoi penser de tout ça, mais en même temps ce n’était pas comme s’il était réellement capable de savoir quoi penser tout court de sa vie.

Dennis aimerait bien être capable de se montrer bien plus optimiste qu’il ne l’était, sauf que ce n’était pas possible. Il faisait des efforts, mais il ne pouvait pas aller à l’encontre de ce qu’il ressentait au fond de lui. Il était mal, très, très mal. Il avait le sentiment de ne pas avoir de vraie vie, de se contenter de survivre sans trop savoir pourquoi il ne se noyait pas tout bonnement. Et là, découvrir qu’en prime l’homme qui leur avait fait tant de mal quand ils étaient enfants était le genre… ennemi numéro un d’un monde dont ils n’imaginaient rien, c’était quand même un peu dur à encaisser. Et se dire qu’il était possible de l’arrêter… ça semblait juste trop difficile.

Il ne parvenait pas à se montrer sûr de lui donc, mais il essayait quand même de croire que ça puisse être possible. En fait, il faisait surtout confiance à Amy. Il se disait que si elle se permettait d’avoir de l’espoir, il devait lui faire confiance et compter sur elle. Enfin, au moins, la suivre. C’était bizarre un peu de se dire qu’il la suivait comme ça dans quelque chose qui semblait juste insensé (mais en même temps ça expliquait tellement de chose sur ce qu’ils avaient vécu tous les deux), après tout ce temps où ils ne s’étaient pas vu, mais Dennis avait la conviction que c’était quelque chose qu’il devait faire. C’était vraiment étrange de se retrouver devant elle de nouveau, il n’avait pas spécialement eu envie de la voir avant et il avait mis du temps à accepter de la revoir, mais maintenant il se rendait compte que c’était peut-être ce dont il avait besoin.

Dennis releva son regard quand il entendit Amy lui demander s’il lui en voulait. Il fut surpris par la question, parce qu’à aucun moment il ne pouvait envisager de lui en vouloir.

« Oh… n-non, pas du tout. » C’était impossible qu’il lui en veuille. Oh, il en voulait quand même à des personnes, il n’était pas dénué de remort. Contre Jedusor principalement, qui était quand même celui qui les avait mis dans une telle situation, celui qui avait encore plus gâché sa vie. Il en voulait à ses parents d’être morts aussi, par moment. Il s’en voulait à lui-même, de ne pas être plus courageux, de ne pas être capable de prendre pleinement sa vie en main et de ne pas pouvoir faire mieux. Mais clairement, il serait bien incapable d’en vouloir à Amy. « Je pensais que… Je pensais que je devais juste… oublier tout ça. » Sauf que c’était impossible, ils le savaient tous les deux. « Mais en fait je crois… » Dennis avait un peu de mal à savoir comment précisément exprimer ce qu’il ressentait, parce qu’il ressentait sans doute beaucoup trop de chose en même temps. « Je crois que j’ai… j’ai besoin de toi. »

Maintenant qu’elle se trouvait là, qu’elle lui avait parlé de tout ça, ça lui semblait évident. S’il devait un jour s’en sortir – et il aimerait bien croire un peu plus que c’était possible –, c’était parce qu’ils s’en sortiraient tous les deux.

Dennis afficha un léger sourire quand Amy lui répondit qu’elle aussi avait besoin de lui. Le jeune homme était un peu mal à l’aise de le dire comme ça, d’affirmer à la jeune femme qu’il avait besoin d’elle, mais en même temps c’était ce qu’il ressentait. Pendant longtemps il avait cru qu’il ne devait pas rester à ses côtés pour ne pas penser à ce qu’ils avaient vécu tous les deux, mais au final Dennis se rendait compte que si… il avait besoin d’elle. Maintenant qu’il l’avait sous les yeux, c’était encore plus évident, Amy lui avait manqué. Alors, il allait quand même quelque peu accuser le coup en découvrant tout ce que la jeune femme venait de lui apprendre, ce n’était pas évident et il allait devoir… supporter tout ça. Mais en même temps, il avait conscience maintenant qu’il pouvait compter sur la jeune femme. Est-ce qu’elle allait pouvoir faire quelque chose pour lui ? Sans doute. Ils verraient bien.

Amy ne se contentait pas de croire qu’elle avait besoin de lui, elle en était sûre. Dennis de son côté n’était pas si sûr d’être vraiment digne du besoin de la jeune femme, de pouvoir réellement lui apporter quelque chose, mais en même temps il appréciait le fait qu’elle lui affirme avoir besoin de lui, c’était plaisant de se dire qu’on comptait quand même pour quelqu’un. Surtout quelqu’un qui avait… l’avantage de comprendre l’autre. Amy et Dennis étaient proches depuis toujours, ils étaient amis bien avant le traumatisme qu’ils avaient vécu ensemble. Mais forcément, ce traumatisme faisait qu’ils étaient les seuls capables de comprendre l’autre. Visiblement, les parents de Amy faisaient ce qu’il fallait pour elle, ils étaient supers, mais il était évident qu’ils ne pouvaient pas comprendre.

« Mais tout ça… » Ce traumatisme qu’ils avaient vécu ensemble, cette épreuve qu’ils avaient vécu à cause de Jedusor. « Ça aide quand même à… enfin tu es la seule qui sait…. Je n’ai pas besoin de dire quoi que ce soit, tu… as pas besoin que j’explique. » Contrairement à ces personnes qu’il pouvait croiser de temps en temps et qui cherchaient à comprendre ce qu’il avait vécu, la raison pour laquelle il était comme il était. Au moins, Amy ne chercherait pas vraiment à l’analyser, elle savait déjà tout. Même si forcément, Dennis aurait quand même aimé que son amie soit épargnée de tout ça… ce n’était pas juste. « Comment ça se passe avec… tes parents ? » Demanda-t-il, finalement. Parce qu’elle lui avait palé un peu de ce qu’elle avait traversé, il comprenait bien qu’elle avait une bonne vie avec ses parents, mais il était quand même curieux de connaître un peu plus sa vie. « Tu leurs as parlé de… tout ça ? »

De ce que Jedusor avait fait. De ce qu’elle venait de lui apprendre sur le fait qu’il y avait des sorciers, des gens qui cherchaient à arrêter leur ancien camarade d’orphelinat. Dennis ne savait pas vraiment ce qu’il espérait qu’elle ait dit.

Dennis ne fut pas spécialement surpris en apprenant que Amy n’avait pas parlé de tout cela à ses parents. En soit, le jeune homme aurait compris qu’elle le fasse, parce qu’elle avait une famille maintenant et des parents en prime qui avaient quand même cette faculté de sonder l’esprit des autres, mais en même temps il n’était pas surpris que son amie n’ait pas pu leur dire. Parce que de son côté, il ne parvenait jamais à exprimer ce qu’il avait vécu. En parler avec Amy était déjà difficile, mais le fait qu’elle ait vécu la même chose l’aidait grandement à le faire. En grande partie parce qu’ils ne prononçaient pas des mots directement à ce sujet, il n’avait pas besoin de se montrer explicite pour qu’elle sache. Alors que les autres autours, il fallait entrer dans les détails et ce n’était pas quelque chose dont était capable le jeune homme. Preuve en était de l’état d’angoisse dans lequel il se trouvait à chaque fois qu’on le questionnait sur son état, à chaque fois qu’on tentait de le pousser dans ses retranchements pour qu’il parle. Mais il ne pouvait pas parler.

Amy n’avait donc pas envie que ses parents la prennent pour encore plus folle qu’ils ne le faisaient déjà. C’était un constat bien triste en soit, mais en même temps il avait aussi conscience de son côté que ses parents devaient bien savoir qu’elle n’était pas tout à fait normale. Dans tous les cas, Amy n’avait pas envie d’en parler, parc e que si elle le faisait ça rendrait tout ça si… réel.

« Oui… » Dit-il dans un souffle, comprenant parfaitement ce que ressentait Amy. Se contenter de vivre dans un cauchemar en se disant que ça pouvait disparaître quand on allait se réveiller, c’était bien plus facile. Même si rien n’allait disparaître. « Si tu as besoin… tu peux… enfin, tu sais… tout me dire. » Ce qu’elle avait déjà fait, bien sûr en lui révélant ce qu’elle venait de lui révéler. Ce qu’il avait encore besoin de digérer, d’analyser et de se faire à toutes ces choses bizarres qui rendaient son expérience encore plus étrange que ce qu’elle n’avait été en vérité. « Mais… enfin, en même temps… » La voix de Dennis tremblait un peu plus, mais il tentait de garder contenance et de se montrer un peu sûr de lui, droit dans ses bottes. « Si on peut… parler de tout autre chose, c’est très bien aussi. On peut parler de tout, tous les deux. De… ce qui est normal, de… tout. »

Dennis avait le sentiment de pédaler dans la semoule. Il n’avait juste pas envie que Amy se dise qu’ils ne pouvaient que parler de ce qu’ils avaient vécu ensemble. Au contraire, ce serait sans doute même mieux qu’ils parviennent à parler d’autre chose. Ils ne pourraient jamais oublier ce qu’ils avaient vécu, ils ne pourraient pas ignorer ce qui les traumatisait tous les deux. Mais ils avaient d’autres choses dans la vie, ils étaient amis avant tout cela, Dennis avait envie qu’ils le redeviennent complètement.

Comme avant ? Oui, c’était exactement ce que Dennis voulait dire. Même si au final, il n’était pas spécialement le plus à l’aise à ce sujet. Il ne savait pas vraiment comment exprimer les choses, c’était encore un peu complexe pour lui tout ça. Il se retrouvait là, devant Amy, et ça faisait vraiment bizarre. Pas seulement parce que la jeune femme venait quand même de lui faire des révélations qui remettaient quand même beaucoup de ses visions en perspectives, mais n’allaient pas pour autant l’aider à y voir plus clair et surtout à s’en débarrasser. Tout cela était un chamboulement déjà, mais aussi… le simple fait que Amy soit de nouveau devant lui.

Donc, oui, en soit quand il disait à la jeune femme qu’elle pouvait lui parler de tout et donc même de ce qui ne concernait pas ce secret qu’ils avaient en commun, c’était vraiment pour que ça soit un peu comme avant. Rien ne pourrait leur permettre d’être vraiment comme avant, parce qu’ils n’étaient définitivement plus les mêmes, mais en même temps ils pouvaient essayer de se retrouver un peu. Quand Amy reprit la parole en lui disant que c’était aussi pour cela qu’elle était venue, en précisant qu’il lui avait manqué… Dennis dut bien avouer que son cœur manqua un battement. Jamais rien ne pourra être comme avant, mais en même temps, ils pouvaient quand même envisager de se retrouver un peu.

« Toi aussi tu m’as énormément manqué. » Dit-il dans un souffle.

Depuis le moment où ils ne se parlaient plus, Amy lui avait manqué. Mais ça avait été trop difficile pour lui d’envisager que rien ne change, de rester en sa compagnie. À l’orphelinat, il n’avait pas pu s’empêcher de l’éviter parce que croiser la croiser ne faisait que lui rappeler ce qu’ils avaient vécu. Il avait cru qu’en s’éloignant, les choses iraient mieux, mais au final il avait été dans l’obligation de se rendre à l’évidence, il n’irait jamais mieux. Sauf qu’il avait mis trop de temps à s’en rendre compte, et ensuite Amy avait eu sa famille et peut-être qu’au final, Dennis n’avait pas pu s’empêcher de ressentir une certaine rancœur à son égard simplement parce qu’elle avait la possibilité de s’en aller, de pouvoir quitter cet endroit quand lui avait passé tous ces étés encore avec Jedusor.

Mais ça avait été idiot de lui en vouloir, même indirectement. Ça avait été idiot de se renfermer comme il l’avait fait, le mieux était sans doute qu’il obtienne le soutien dont il avait besoin auprès de la seule personne capable de le comprendre et de savoir précisément ce qu’il ressentait. Cette personne étant bien évidemment Amy.

Sans trop savoir d’où cela lui vint, Dennis décida de s’approcher un peu plus de Amy et de… la prendre dans ses bras. C’était un geste qu’il ne faisait jamais et il n’était même pas sûr que ça soit une bonne chose, mais ça lui vint comme ça, il en avait… besoin.